il y a de ces œuvres qui nous touchent et nous fascinent en un seul et unique regard.
parce qu’il y a une certaine facture, une patte certaine qui donne envie d’en voir davantage – même si l’artiste ne semble pas être reconnu pour ses talents certains.
c’est le cas de cette toile sur laquelle est tombée lou chez l’un de ses contacts.
- une magnifique toile.
elle murmure en se retenant de peu de s’approcher pour toucher de ses doigts blasphématoires les coups de pinceaux qui ont créé le chef d’œuvre.
la personne se retourne, hausse les sourcils. ne dit rien de plus et continue de bavarder avec lou pour entretenir son cercle privé – tandis que lou tente de glaner des informations pour le bien commun, miguel et lou ayant besoin de connaître les gens de la haute.
vous savez ce qui est particulièrement agaçant avec ces gens qui ont tout ? ils ne voient plus ce qu’ils ont devant les yeux. ils sont sans cesse dans l’outrancier, à vouloir toujours plus, même ce qu’il y a de plus hideux.
si bien que lou se persuade que si ce tableau magnifique a un jour été désiré et vu pour sa splendeur, il est aujourd’hui catégorisé comme une vieillerie has been, plus suffisamment nouveau – même s’il n’a que quelques jours – pour être digne d’intérêt.
elle ne tarde pas à quitter son contact, les oreilles bourdonnantes, pour se rendre à la fabrique.
si lou n’y a pas véritablement sa place sans miguel, elle apprécie les rassemblements mondains – mais artistiques, au contraire de ces rendez-vous hebdomadaires – qui s’y déroulent. elle a ce besoin d’évoquer avec des connaisseurs – des vrais – cette toile qu’elle a vue. d’autant qu’elle reconnaît un certain style qu’elle a déjà croisé – sans savoir jamais qui en était l’auteur, la signature toujours oubliée.
elle pénètre dans la salle blanche, comme un éléphant au milieu d’un magasin de porcelaines. son entrée se fait immédiatement remarquer, mais pas parce que lou n’a rien à faire ici. juste parce que lou accroche les regards dans chaque endroit où elle passe. avec ses tenues trop courtes, la peau outrageusement visible, ses cheveux courts – à la garçonne – et ses lèvres rouge sang… lou est la personnification de la femme libérée, femme fatale assumant ses choix et ses envies. loin de la femme au foyer qui courbe l’échine et hausse la tête de bas en haut pour signifier son assentiment.
elle se poste face à l’un des tableaux qui peuple l’un des murs, exposition qui ravit sa rétine. et elle marmonne, plus pour elle-même que pour un quelconque auditoire :
- c’est vraiment un travail d’artiste.
la fascination et l’admiration percent sa voix comme des millions d’aiguilles. elle s’approche d’un peu trop près, cherche encore une fois une signature qui vient à manquer.
et sa voix résonne fort dans la pièce quand elle demande :
- quelqu’un a une idée de l’auteur de cette toile ?
être remarquée n’a jamais dérangé lou birds, bien au contraire. elle a ce besoin viscéral de trouver l’artiste qui la fascine depuis quelques semaines sans pouvoir mettre un nom dessus. elle aimerait le rencontrer, le connaître, et pourquoi pas écrire une critique méliorative sur son travail qui lui plaît tant.
lou n’est pas une artiste. la seule chose qu’elle manie, ce sont les mots. alors lou brûle de ce besoin de comprendre ce qui passe par la tête des peintres lorsqu’ils s’expriment sur leur toile vierge. lou brûle de ce besoin d’apprendre – sans pouvoir jamais égaler. de ce besoin de se nourrir de ce qui existe déjà, à défaut de le créer.
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