s o l e i l NOIR complètement STONE

Sous les couvertures sous les ouvertures sous les fêlures,
Je te retrouve on se recouvre on s'ouvre,
Dans les cieux dans tes yeux et même chez les malheureux.
On embrasse le ciel, il a un goût de sel,
On s'aime.



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En un ton, elle nia tout. D’avoir été, de ne pas avoir été. De s’être absentée, d’avoir sauté ; d’avoir voulu la sauter. Elle a soufflé dans l’été les cris brisés d’un être ajusté à une esquisse imposée ; implosée.

Elle en fait un tas. Une explosion de peurs dilatées dans son iris qui lui tire les traits dans les nuits affreuses. Elle ne peut plus. Imaginer, penser, s’exiler dans les astres désaxés ; elle ne se l’autorise plus. Elle préfère palper l’anthracite d’un brut qui l’encadre, qui l’entrave, qui la crève. Non. Non je ne t’aime pas. Elle l’a dit. Elle l’a soufflé, crié, pleuré ;elle a clamsé. Non, Joe tu ne chantes pas les airs des amoureux dans ma tête. Elle lui lâche dans un soupir muet. Elle oublie de continuer cette phrase qui n’était pas sienne. Tu chantes ces airs dans mon coeur, Joe.

Sa déréliction se pend à chaque coin de rue. Stone n’est pas de ces filles qui veulent se faire plaindre ; et pourtant, au sein des silences, on entend ce sanglot qu’elle n’arrive pas à dompter. Ses cuisses tremblent car ses reins se meuvent dans la honte d’avoir désiré la belle chair. Elle cache ses lèvres: comme une impression qu’elles veulent dire son nom à chaque phrase, chaque mot, chaque syllabe, chaque lettre – et même chaque néant ; dans l’entracte des paroles, Joe subsiste.

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30 mai 1965

Bonjour Monsieur,
Veuillez trouver dans ce courriel mon article, qui, je pense, sera certainement le dernier.

Stone. Nouveau nom montant dans l'industrie de la musique. Silhouette émergente du néant, qui arrive à regrouper un tas de corps mouvant sur ce même rythme entraînant. Un malicieux mélange de paroles finement écrites et de sons empruntés au rock.
Vous, lecteurs, pensez certainement que je vais dans cet article, tenter de critiquer sa musique pour pouvoir être lue par tout le monde - chacun sait que la colère vent bien plus en terme journalistique. Mais je ne suis pas là pour cracher sur les sons composés et les textes chantés.

J'écris cet article simplement pour que la vérité éclate.
Pour que le monde puisse enfin m'écouter.

Stone n'est qu'une voix. Stone n'est qu'un corps. Stone n'est que chorégraphies et mensonges. Stone n'a jamais composé, elle n'a jamais écrit - elle est juste plus facile à vendre, on peut lui accorder ça.
Je suis l'auteure de chaque chanson que vous écoutez dans son album.
Non, je ne demande pas de l'argent, ni de remplacer Stone sur scène - je veux simplement la reconnaissance qui m'est due.

Stone est un mensonge.

Joe Wright.

L'homme lit la lettre avec attention, fronce les sourcils en haussant les épaules. Encore une journaliste ayant perdu raison ; il en a vu beaucoup sombrer ainsi dans ce complexe de non reconnaissance. C'est bien propre aux femmes, ça. Parfois, il se demande même si il fait bien d'en engager dans son bureau - elles remplissent bien mieux leur fonction de maîtresse de maison.
Un soupir accompagne ce geste qui jette le manuscrit dans le bac à ébauches ; celui qu'il remplit d'articles non publiables pour ensuite en faire un beau feu le soir.
Demain, il faudra qu'il ait une discussion avec Joe ; elle devra cesser d'exercer, elle divague bien trop désormais.


Chaque matin est un peu plus dur. J'sens à chaque fois la honte me griffer la gueule. J'revois la face de Joe quand elle a réalisé que tout ça n'était qu'une mascarade. J'entends encore sa voix se briser quand j'suis obligée de lui avouer qu'on n'pourra plus marcher dans la rue main dans la main. Elle est partie en claquant la porte et en me laissant moi, dénuée de talents ; le mensonge dans les bras et que de la superficialité à embrasser.
Parce que j'déteste ce monde, j'déteste tout ça.
Du manager véreux au fan persuadé que j'vais pouvoir lui apprendre qui il est vraiment quand moi-même je ne sais pas qui je suis. Qu'est-ce que je veux.
J'voulais seulement qu'elle soit connue ; mais maintenant c'est moi sur la scène et elle sur le trottoir.
Parfois j'la croise pas loin de notre ancien appartement, j'suis à deux doigts d'lui avouer que j'pourrai quitter tout ça pour elle,
pour ses lèvres, pour ses yeux, pour ses doigts et surtout ses mots.
Mais la célébrité et le confort de l'argent est bien trop traitre ; on fini par avoir la tête qui tourne et être persuadés de ne plus pouvoir vivre sans.
Alors j'rentre chez moi,
seule.

Incapable d'assumer ce que je suis - et ce que je ne suis pas.